La protection des terres agricoles Débat du 8 septembre 2016

« Dans la région PACA tous les trois ans, ce sont 250km² de terres cultivables, soit l’équivalent de la superficie de la ville de Marseille, qui disparaissent de nos paysages sous le béton et l’étalement urbain».

Jeudi 8 septembre 2016 le Collectif pour l’Avenir du Territoire organisait une projection du film « Faim de Terre » (voir notre article) dans la salle de l’Atrium à Salon de Provence.

Le Collectif pour l’Avenir de notre Territoire ( CAT ) est une association qui rassemble de jeunes citoyens Salonnais autour de thèmes de réflexion tels que la réintégration de la jeunesse dans la vie de la cité, la modernisation de la vie sociale, culturelle et politique locale, la dynamisation du territoire…

Cette projection a été suivie d’un débat réunissant Jean-Pierre Maggi maire de Velaux et député des Bouches du Rhône, Jean-Marc Zulesi  président du CAT et organisateur de cette projection/débat, Nidal Abdelkrim de l’association « Filière Paysanne » et Mireille Lambertin  présidente de l’association « Foll Avoine ».

En introduction Jean-Pierre Maggi a clairement exposé le problème : la destruction des espaces cultivables a été qualifiée de « catastrophe irrémédiable » et leur préservation d’« urgence absolue ». Les raisons qui rendent indispensable la protection des terres cultivables ont été exposées :

  • Préserver la capacité d’autosuffisance alimentaire du territoire  pour les générations à venir
  • Conserver la capacité des sols à stocker le carbone sous forme organique et à lutter contre le réchauffement climatique
  • Permettre le maintien des nappes phréatiques dont la baisse devient de plus en plus inquiétante
  • Lutter contre l’imperméabilisation des sols et des risques d’inondation aujourd’hui en forte augmentation
  • Préserver le patrimoine paysager et la biodiversité

Conscient de ces enjeux, Jean-Pierre Maggi a lui-même mis en œuvre une procédure de PAEN  (Périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains) pour sanctuariser 400 ha de terres agricole sur sa commune. Les PLU à venir ne pourront plus rendre ces terres constructibles sans nécessité absolue.

Le débat avec la salle a été l’occasion  de mettre en lumière quelques non-dits  importants (notamment au travers de l’intervention d’une personne responsable – non élue- d’un service d’urbanisme) :

  • Ce sont les agriculteurs eux-mêmes (ou  anciens agriculteurs ou familles d’agriculteurs) qui font pression sur les élus pour rendre constructibles des espaces cultivables.
  • Les aménageurs/promoteurs sont aussi parmi les premiers responsables : malgré une croissance démographique quasi nulle dans la région (0.2% entre 2007 et 2012 pour la Métropole AMP), ils entendent bien continuer à aménager  ZA et lotissements au même rythme que par le passé, voire plus rapidement encore (renouveler les espaces n’est pas assez rentable). Ils manœuvrent donc eux aussi auprès des élus.
  • Les élus ne savent pas résister à ces pressions (et ont même parfois envie de les accompagner). Certains trouvent par exemple plus valorisant de créer des plateformes logistiques pour importer des produits agricoles plutôt que de favoriser leur production sur place. Ces plateformes sont pourtant très  peu créatrices d’emplois et contribuent à la destruction des filières agricoles locales ; par le trafic des camions qu’elles occasionnent elles contribuent également à la pollution de l’air dans notre région et à la production de CO²
  • Des moyens de protection existent pourtant (PAEN, ZAP, PLU,… Voir ici ) mais ne sont pas utilisés. Il n’y a que 7 PAEN en France sur 36500 communes (dont celui de Velaux)
  • L’action des mouvements paysans et des citoyens est nécessaire pour lutter contre ce phénomène

La valorisation du travail des agriculteurs a été également évoquée par la salle :

  • Un participant rappelle qu’il vendait le kilo de tomates  6,50 Francs il y a 25 ans de cela et qu’aujourd’hui il ce même kilo de tomates est vendu 1 Euros, soit le même prix. Entre temps le prix des tracteurs, du carburant et de la main d’œuvre a largement augmenté
  • Un autre intervenant souligne qu’achetées par des centrales d’achat, ces tomates sont acheminées par camion dans des centrales logistiques puis reviennent dans les Casino d’à côté (géants ou petits) où elles sont vendues 2,50 Euros, voire plus,  après avoir parcouru quelques centaines de kilomètres … !
  • Le producteur est soumis à la concurrence internationale espagnole ou marocaine. Ce sont les supermarchés et leurs intermédiaires qui prélèvent l’essentiel de la marge.

Mireille Lambertin, présidente de de Foll Avoine, a insisté sur la nécessité d’une agriculture raisonnée minimisant l’utilisation des produits phytosanitaires ou OGM et préservant les sols. L’association Foll Avoine est  à l’origine de la production du film « Faim de terre » (au travers d’un financement participatif).

Nidal Abdelkrim de Filière Paysanne (voir Filière Paysanne) a présenté les pistes proposées par son association. Celles-ci sont très intéressantes :

  • Rendre l’avis de la commission de consommation des terres agricoles CDPENAF réellement décisionnel et non simplement consultatif comme ceci est le cas aujourd’hui. Cet avis d’une commission réellement consciente des enjeux agricoles régionaux, composée d’acteurs indépendants, doit s’imposer aux responsables des documents d’urbanisme (SCOT, PLU,…). Cette proposition serait particulièrement efficace pour éviter les pressions des propriétaires et des aménageurs sur les élus.  Voir le dossier établi par Filière Paysanne
  • Projet Alimentaire Territorial : En organisant les filières agricoles et agroalimentaires au niveau local, il s’agit de mieux répondre aux besoins alimentaires d’un bassin de vie grâce au développement de la production agricole dans ce bassin. L’enjeu aujourd’hui pour la Métropole AMP est de mettre réellement en place cette démarche prévue dans la loi d’avenir pour l’agriculture de 2014. Voir les liens suivants :
  • Plateforme paysanne locale : il s’agit de répondre localement aux besoins alimentaires des collectivités (et plus). Depuis janvier 2014 la plateforme mise en place par Filière Paysanne fournit les collectivités du Pays d’Aubagne (9000 repas/jour). Voir ici
  • Marché d’intérêt local : développement d’un marché de semi-gros adapté aux besoins des producteurs locaux. Voir ici

La conclusion de ces échanges  a été claire :  Les citoyens doivent se mobiliser. Et au-delà des simples déclarations d’intention, les élus doivent véritablement porter et mettre en œuvre les propositions de Filière Paysanne. (A noter que l’adoption d’une loi n’est pas indispensable pour que les élus s’engagent d’eux-mêmes à respecter les prescriptions des commissions de consommation des terres agricoles dans les PLU et les SCOT…)

Sur le même sujet, voir les liens suivants :

http://agriculture.gouv.fr/paysage-la-preservation-du-foncier-agricole

http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/documents/pdf/140514-ONCEA_rapport_cle0f3a94.pdf

Hors réunion : On rappelle que  le SCOT Agglopole Provence avait reçu un avis défavorable de la Commission Départementale de Consommation des Espaces Agricoles (CDCEA). Malgré cet avis négatif le SCOT a été approuvé à l’unanimité (et donc avec la voix de M. Maggi). Suite aux remarques de la CDCEA, les seules modifications introduites juste avant l’approbation finale ont consisté à accroitre encore les consommations de terres cultivables sur les communes d’Eyguières et Mallemort…

TP

Publié dans Agriculture, Urbanisme

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